Du haut de la vallée, je regardais la rivière en
colère, tel un serpent jaune, se faufilant à toute
vitesse prêt à bondir à tout moment sur sa proie.
Les pluies diluviennes de la nuit avaient gonflé les
torrents et augmenté leurs eaux.
À présent, on entendait la rivière gronder,
emportant tout sur son passage, délogeant d’énormes
roches qui se cognaient, se fracassaient en un
vacarme incessant. Branchages et arbres raclaient
le lit et poussaient sur les baies du gravier, élément
nécessaire à la construction des maisons en dur.
Cochons, cabris et vaches, le ventre gonflé
d’eau, virevoltaient comme des feuilles au-dessus
des bassins, puis fonçaient à toute vitesse emportés
par les courants, ne voulant point rater leur rendez-vous
avec la mer.
Quelques jours plus tard, la mer, comme un
estomac ayant trop mangé, les vomirait, tous sans
exception. On allait les retrouver sous un palétuvier
ou un raisin de mer, gisant sur les galets, la bedaine
au soleil et tendue comme un tambour, le corps
recouvert de mouches, les yeux prêts à exploser.
Puis, les vers allaient faire le reste jusqu’à ce qu’il
ne reste qu’os et cornes desséchés au soleil et
rongés par le sel. Ils prendraient alors des formes
bizarres, pointant le ciel tel des monuments et ne
manqueraient pas d’attirer l’attention des promeneurs
atterrés par leurs postures invraisemblables.
EXTRAIT DE "LA VÉRANDA"
un lien entre le roman et le sîte de la Grivelière, on s y retrouve c est bien
RépondreSupprimerNadine