samedi 23 juillet 2011

Histoire de CONQUE mais pas de CANCRE.



Aux  Antilles comme dans beaucoup de pays, certains objets anodins sont parfois chargés d’histoire. C’est en surfant sur internet un après-midi d’été où le ciel avait pris une allure automnale qu’à ma grande surprise la photo d’une conque à lambis me parut à l’écran.
 La photo en question aurait pu passer inaperçue si je n’avais pas eu l’idée de la poster en photo sur mon mur Facebook. Ah ! Me diriez-vous !!! Encore ce Facebook ! Cet outil de malheur où tout le monde épie tout le monde en chattant de tout et de rien. Très amusant comme moyen de communication et très efficace aussi.
J’avais lu quelque part qu’en mai 1967 lors d’un soulèvement et une grève d’ouvrier en bâtiment que des conques de lambis avaient été utilisées comme arme redoutable pendant ce conflit dont personne ne connait jusqu’à présent la fin de l’histoire. Je décidai donc d’ouvrir le débat en postant comme entrée en matière : Arme redoutable de mai 1967 sans prétention. Lorsque je fis le bilan en fin de journée. Je me rendis compte alors que j’avais plus d’une vingtaine de personnes qui avaient trouvé cette photo belle et quelques trentaines de commentaires très intéressants.
Enfant, je me rappelais les tombes en conque de lambis. L’espace d’un instant, je me suis vu en train d’allumer des bougies dans ces conques qui décoraient, mais elles retenaient  la terre des tombes ou trônait des croix en bois avec le nom  de la personne ou les personnes inscrites dessus. Les cimetières en étaient tout pleins de ce genre de tombe. Plus on en avait, plus la personne enterrée était importante ou riche.De nos jours, c'est un signe de pauvreté ou d'abandon. Les tombes ont même des barrières avec des clés.Comme le monde change.On protège même les morts des invasions. Bien que la comparaison fut complètement farfelue, je ne pus  m’empêcher de penser aux tombeaux d’Égypte. Je me dis alors que cette histoire de conques devait provenir de quelque part. Ah ! Que ferions-nous de nos jours sans ce fabuleux outil qu’est internet ! En un clic je trouvai ma réponse que je ne vais pas m’amuser à reprendre, mais tout simplement recopier en rendant à césar ce qui appartient à césar avec ses imperfections et son style....(je ne modifie pas le texte de l'auteur et il a été recopié comme publié par lui) :
« On peut lire sur de nombreux sites « qu’au temps de l'esclavage, la conque permettait de communiquer de colline en colline pour annoncer les grands évènements de la vie : naissance, mariage, mort, mais aussi les révoltes. Elle annonçait le départ et l'arrivée des canots de pêche de son bruit assourdissant et donnait le signal de la récolte des ignames. C'était à la fois la radio, le téléphone et un instrument de musique. Malheureusement, l'art d'émettre les sons que l'on entend à plusieurs kilomètres est de moins en moins transmis. Il existait réellement un authentique dialecte du lambi. Les plus belles coquilles décoraient les tombes des pêcheurs. Les autres ont été utilisées pour faire des digues et il reste encore des fours à chaux, témoins de son utilisation industrielle. Elle faisait partie de la vie de tous les jours, des jours de fête et des jours de deuil. »

C’est un fait que je n’ai jamais vu dans toutes les recherches que j’ai pu effectuer sur cette période allant de la colonisation à l’abolition, je n’ai jamais trouvé une seule mention de la conque de lambi faisant office de vecteur de communication, la référence fut toujours le tambour que les maîtres d’habitations craignaient et tentèrent d’interdire l’usage, ce à maintes reprises au cours de l'histoire.
Ce fut le tambour, instrument de musique que les colonisateurs imputaient ce dialecte, une capacité à faire des mots à travers des battements ou des rythmes ou des lignes mélodiques particulières, permettant d’informer l’île, la totalité de l’île des décès, unions et autres faits suscitant l’intérêt des populations esclavagées. Il fallait moins de 6 h pour qu’un évènement se produisant à Fort-de-France (Fort Royal) ne soit répercuté ou connu au Vauclin, ce qui à cette époque constituait un exploit.

Il est possible que la conque de lambi ait joué le rôle qu’on lui prête dans des portions de territoire pendant l’esclavage ou juste après l’esclavage, je pencherai pour des pratiques postesclavagistes, car n’ayant pas souvenir d’avoir lu non plus qu’on trouvait des conques dans les cimetières d’esclaves mis à jour, toutefois on en trouve des quantités très importantes dans les gisements amérindiens, ce coquillage était prisé en tant qu'aliment et pour les parures de nacre par ces populations.

Pourquoi les libérés, les plus modestes ont-ils pris le soin de décorer les tombes avec ces conques de lambi, est-ce que ces coquillages avaient une valeur cérémoniale dans certaines cultures africaines ou est-ce une survivance de pratiques Amérindiennes ou enfin un fait isolé qui s’est diffusé à un grand nombre, je ne saurai le dire, quoi qu’il en soit, c’est en Guadeloupe que l’on retrouve ces tombes décorées de conques de lambis.

Mais l’histoire funéraire des esclaves de la Martinique et de la Guadeloupe reste à écrire

Tony Mardaye (source PIYE PIMANLA) »

Tony Mardaye a si bien résumé l’affaire de la conque à lambis que je n’ai pu m’empêcher de le reprendre ici.
Un grand merci à Tony Mardaye pour ses recherches.

Tony MARDAYE est né en Martinique en 1962 dans le quartier des Terres-Sainvilles. Juriste spécialisé en Droits Humains et en Action humanitaire, économiste en aménagement du territoire et en développement local, diplomé en histoire des techniques, il milite au sein du Collectif DOM.

2 commentaires:

  1. s'il est établit que le tambour était un élément de communication aux antilles, "an-tan longtan", la conque de lambi appartient au monde de la mort, d'ailleurs aujourd'hui encore aucun antillais n'en possède chez lui. L aconque doit rester dehors car c'est le véhicule des esprits. Vérification faite,cette survivance de la culture animiste africaine est encore largement pratiquée dans toutes les Antilles, Grande, Petite,indépendante ou pas.

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  2. Effectivement Dominique, la conque de lambis tel qu'on la voit actuellement a traversé bien des histoires; instrument de musique servant à alerter, à rassurer, mais également utilisée dans des lieux plus sombres mais réels tel le cimetière, aujourd'hui elle est devenue si rare qu'elle se retrouve dans des boutiques de souvenirs ,comme lampe à chevet ou autre; enfin pour dire que, quoique son histoire elle reste un symbole de croyances ,de mystères et invoque bien d'autres clichés pour certains; aussi rare que l'or, quand on la chance d en avoir une, on la cache comme un trésor ; en fait elle en est un, avec sa couleur nacrée et cette impression de fragilité. Nanadydy

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